« Dans des temps reculés, alors que seule la fureur et la soif de pouvoir animaient les êtres qui peuplaient la Terre, des entités virent le jour. Toutes issues des multiples sentiments émanant des créatures terrestres. Haine, peur, colère, vengeance… Jalousie. Ces entités en question prirent au fils des années diverses formes, animales, végétales et parfois même humanoïdes. Cette nouvelle catégorie d’êtres se nommait les Dévorantem, autrement dit les Dévoreurs. Chaque représentant de la race, peu importait son apparence, subsistait en dévorant la matière noire par laquelle il était créé, ceci dit en la puisant dans les individus qui lui était à portée de main. Et, usant parfois même de son pouvoir, attisant en sa victime les émotions négatives nécessaires à sa propre survie.
Parasites. Ce fut le premier mot outre leur nom qui servit à les qualifier. Ils n’étaient rien de plus que des parasites, des créatures pitoyables ne vivant qu’en se « greffant » sur d’autre, les consumant peu à peu par les sentiments ravageurs qu’ils faisaient naître en eux. Pourtant, ils n’étaient pas si différents de certaine espèce telle que les buveurs de sang. Mais il fallait des méprisés. Des victimes. Il fallait des dominants, ainsi que des dominés.
De parasite, leur nom mua en « démon ». Démon de bas fond, s’entendait bien. Quel autre rang aurait pu avoir des êtres engendrés par d’aussi futiles choses que les sentiments ?... Aucun. La question ne se posait même pas.
Les années passèrent. Les siècles. Un millénaire. L’existence des Dévoreurs plongea peu à peu dans les abysses de l’oubli. Plus personne, ou presque, ne se souvenait d’eux. Comme s’ils avaient disparu. Comme s’ils n’existaient plus.
Mais c’était faux. C’était faux… Ils étaient encore là, quelque part. En faible quantité, certes, mais ils étaient toujours là.

Tout comme lui.
Zeli.

Jalousie. Zeli était l’engeance de ce sentiment. Le plus destructeur. Celui qui consumait tout, ne laissant derrière lui rien de plus que le néant. Qu’une traînée de feu sanglant…
Le Dévoreur en question faisait partie des « humanoïdes » même si son apparence différait des autres appartenant à cette catégorie. Il avait plus ou moins forme humaine. En effet son corps n’était pas comme celui des mortels. Il était comme difforme, incomplet. Et, peut-être que mis à part son physique, il n’était pas non plus tout à fait comme les autres…

Il était juste différent.

Le Dévoreur ignorait quel était le jour de sa naissance, quelle en était l’année. Il avait l’impression d’exister depuis toujours. Depuis longtemps. Peut-être trop longtemps, d’ailleurs.
Zeli avait tout vu. Tout vécut. La Terre ne lui inspirait rien de plus qu’ennuis et lassitude. Les terrestres étaient fades, abjects. Pour lui, ainsi que pour tant d’autres, ils n’étaient guère plus qu’un potentiel moyen de subsistance. Moyen de subsistance bien plus accessible que les créatures surnaturelles, on ne pouvait le nier. C’était sûrement cette facilité qui le dégoutait. Ils étaient bien trop prévisibles. Bien trop faibles…

Bien trop humains.

Zeli avait déjà dévoré une bonne quantité de cette fameuse matière noire. Il était devenu puissant et ce, un peu plus à chaque siècle. Il ne craignait rien. Et il pensait que cela aurait toujours été le cas. Que rien ne viendrait bouleverser sa précieuse éternité.

Mais il se trompait.

[ Ad Sequendum ]